24/01/2025

Monétisation, je chie ton nom

Hier ce cher Nithou poussait une râlante sur le sujet de la monétisation trop répandue dans les blogs et les newsletters, et je dois bien admettre que ça m'a parlé. Malheureusement.

Je pense que le problème est double.

D'abord il y a des plateformes qui vivent du temps qu'on passe dessus, qui ont besoin de contenu pour nous faire passer beaucoup de temps dessus, mais qui ne veulent surtout pas dépenser pour produire ce contenu. Donc ces plateformes font croire à leurs utilisateurs qu'ils peuvent "monétiser leur contenu", à commencer par un "partage" des revenus publicitaires. Beaucoup plongent dans ce piège pour devenir "créateur de contenu à plein temps" (on pourrait parler de cette dénomination, ce sera une autre fois), mais au fil des années la proportion du "partage de revenus" s'est réduite et ces auteurs se retrouvent à devoir rendre une partie de leur travail exclusif derrière un paiement ; les exclusivités Patreon sont tellement légion que des plateformes comme YouTube mettent en place directement le même genre de système d'abonnement pour pouvoir prendre leur part du gâteau.

Ensuite vient la "hustle culture", qui voudrait que tout ce qu'on fait ait un but lucratif. Tu aimes faire du crochet ? Tu devrais vendre des machins crochetés ! Tu devrais faire du yoga le matin, ça te rendrait plus productif ensuite ! Qu'on ne me fasse pas dire ce que je ne dis pas : chercher d'autres sources de revenus ça se comprend, et ce n'est pas ce dont je parle ici. Je parle de ne pas envisager qu'on puisse faire quelque chose pour le plaisir, sans chercher soit à le vendre directement soit à l'utiliser comme moyen de mieux vendre ou comme appât pour vendre autre chose (par exemple je pourrais terminer chaque article par "je suis disponible pour du travail de consultance, écrivez-moi").

En ce sens ça se rapproche du "personal branding", la construction d'une marque-soi qui a aussi une finalité lucrative. J'en ai été victime dans une certaine mesure. Le nom de domaine jkbockstael.be date de la fin de mes études, quand je voulais une présence Web et une adresse e-mail qui "fassent professionel". Personal branding. À l'époque on pouvait choisir la couleur de fond de son profil Twitter, j'ai choisi la même que celle de mon site. Personal branding. Plus tard je n'osais plus publier sur mon blog quoi que ce soit qui ne soit pas technique, parce que vous comprenez je suis un professionnel de l'informatique donc mon blog doit parler d'informatique ; du coup je ne publiais presque plus rien, et ça a duré dix ans. Personal branding. Pure saloperie.

Voilà pourquoi je refuse de monétiser mon expression, même si on n'a jamais trop de revenus. Je refuse d'entrer dans cette logique où tout a un prix mais plus rien n'a de valeur. Je refuse de devenir un produit et de ce fait cesser d'être une personne.

Donc il n'y aura jamais ici d'articles payants, je n'aurai jamais de newsletter à abonnement, ni même de "contenu sponsorisé", de lien affilié, ou quoi que ce soit d'autre du même ordre. Tout au plus je peux accepter l'idée d'une urne dans laquelle chacun est libre de déposer quelque chose ou pas. Ce serait l'équivalent asynchrone et longue-distance de me tendre un café, et ça ne fait pas entrer dans un lieu ou un groupe exclusifs.

Pour ceux qui veulent voir leur nom dans une liste de "Gold Tier Patreons" : vous n'êtes pas à la bonne adresse.


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